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Séminaire : "Le racisme en Corse" le lundi 29 septembre à 14h

Lundi 29 septembre 2014 à 14h
Séminaire : "Le racisme en Corse"

Salle DE02, Campus Mariani, UFR Droit

 

Dans le cadre de son cycle de séminaires, l'équipe Dynamique des territoires et développement durable du Laboratoire Lieux, Identités, eSpaces et Activités (CNRS-Université de Corse) organise un séminaire le lundi 29 septembre 2014 à 14h sur le thème "Le racisme en Corse". Ce séminaire sera animé par Marie Peretti,docteure en sociologie et membre associée au Centre d'Analyse et d'Intervention Sociologiques (CADIS, CNRS-EHESS) qui a dernièrement publié un ouvrage Le racisme en Corse. Quotidienneté, spécificité, exemplarité, Ajaccio, Albiana, 2014, 426 p .

LE RACISME EN CORSE

À partir d’une démarche qualitative s’appuyant sur des entretiens semi-directifs et des observations réalisés en Corse entre 2004 et 2010 ainsi que sur l’analyse d’un corpus comprenant notamment quinze rapports institutionnels, deux cent quarante-quatre articles de la presse régionale, cinquante-six articles de la presse nationale, des extraits d’émissions télévisées, d’allocutions publiques et de sites internet, je montre les significations de l’expérience raciste, du point de vue de ses auteurs comme de ses victimes. Pour analyser ces significations, je lis le racisme à la lumière d’un phénomène général qui incombe à des processus microlocaux, régionaux, nationaux et globaux.

Les quatre parties de cet ouvrage interrogent la manière dont ces significations particularisent, ou non, l’expérience corse.

La première partie étudie les débats publics sur le racisme en Corse au cours des années 2000. Elle s’intéresse aux termes des débats, à leurs acteurs et aux enjeux que révèlent les discours collectés ainsi qu’à leur performativité. Si ces débats présentent une certaine unité – termes et acteurs du débat sont souvent les mêmes ; ils sont, en outre, pris dans une même temporalité – une distinction s’impose toutefois entre les échelles locale et nationale. Des points de vue divergent, çà et là, en ce qui concerne la figure-type du raciste et les enjeux liés à son identification. L’analyse de ces divergences m’a conduit à étudier l’hypothèse d’un lien entre « nationalisme » et « racisme » corses, qui accompagne et renforce, dans le débat public national, l’idée selon laquelle il existerait un racisme spécifique en Corse. Cette hypothèse contribue souvent, dans les débats, à occulter les manifestations les plus quotidiennes du racisme au bénéfice des manifestations de violence. Cette première partie montre, plus largement, que les interventions publiques portant sur le racisme en Corse sont insuffisantes pour comprendre l’expérience vécue des individus minorisés.

Ce sont les contours de cette expérience qui sont présentés dans une partie suivante, à partir d’une réflexion portant sur la diversité des processus de différenciation qui concernent « Maghrébins », « Pinzutti », « Italiens », « Pieds-Noirs », « Portugais » mais aussi « touristes », « Juifs » et « Noirs » en Corse aujourd’hui. Cette réflexion atteste de la nécessité d’établir des va-et-vient entre processus de construction de la différence, expérience des groupes altérisés et travail de définition des frontières de l’acceptation ou du rejet. Pluriels et complexes, ces processus de différenciation appellent une approche transversale portant sur la construction des catégories, les modalités de l’adresse et les représentations. La deuxième partie de cet ouvrage indique la prégnance de représentations historiquement liées à l’entreprise coloniale. Elle montre également l’importance de croiser les jeux de regards en direction des différents groupes pour saisir la pleine signification de ces représentations. Ces processus de différenciation ne doivent toutefois pas être confondus avec des manifestations de racisme. S’il y a, ici et là, des jeux relationnels qui présentent des similarités, le racisme constitue toutefois un rapport à l’Autre spécifique.

La troisième partie en étudie les manifestations. Elle s’intéresse à l’actualité du racisme et à la variation de ses manifestations. Représentations, discours et pratiques racistes sont distingués pour les besoins de l’analyse. Les difficultés méthodologiques qu’impliquent la saisie et l’analyse de chacune de ces manifestations ont conduit à opérer des choix méthodologiques. En choisissant d’envisager les effets de ces manifestations racistes, ce travail met en évidence le climat général qu’expérimentent les acteurs minorisés. L’approche monographique développée par la suite, montre comment représentations, discours et pratiques racistes s’articulent de manière relativement différente dans plusieurs micro-territoires. Les enseignements issus de cette partie permettent de se situer dans le débat portant sur la détermination des ressorts du racisme. Ils invitent à considérer que les fondements du racisme sont, en Corse, plus conjoncturels que structurels. Ce dernier aspect amorce une réflexion, développée dans une quatrième partie, sur les spécificités du racisme dans l’île.

Cette quatrième et dernière partie montre l’importance des dimensions conjoncturelles et politiques du racisme. Si le contexte insulaire est clivé par des frontières, ethniques, raciales, sociales et genrées qui sont étroitement liées à la structuration de l’espace social et confèrent au racisme des spécificités, ce dernier s’enracine toutefois, aujourd’hui, dans la déstructuration et la mutation de ces formes sociales. Il se greffe sur des zones de concurrence qui prennent racine dans les changements survenus dans l’île depuis les années soixante et se chargent de valences particulières dans un contexte marqué par des modalités spécifiques d’accès à l’arène délibérative. Finalement, plus que la concurrence en elle même, c’est la difficulté à conflictualiser autrement qu’en termes ethnico-raciaux ces tensions, qui ouvre un espace au racisme. Ce dernier aspect invite à questionner le racisme présent en Corse sous l’angle de ses dimensions politiques. Plus que les liens entre nationalisme et racisme, c’est l’existence d’un conservatisme hybride, mêlant différents registres, qui explique les particularités de l’exemple corse. Je parle, dans cette quatrième partie, de racisme conservateur, pour caractériser un phénomène dont les ressorts s’inscrivent au croisement de plusieurs éléments de contexte. Au niveau individuel, il traduit un rapport particulier des individus au pouvoir, moins caractérisé par la contestation que par l’anomie. Au niveau collectif, il fait écho aux mutations liées au passage d’un régime d’interaction principalement traditionnel à un régime égalitaro-méritocratique puis à un autre, centré sur la question de la différence, dans un contexte marqué, au niveau objectif, par la prégnance des inégalités. À chacun de ces niveaux il existe, en effet, des interstices où se loge un racisme spécifique, tenté par la conservation.

 

 

 

 

 

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| Mise à jour le 06/03/2017